Le roi est mort
Auteur: Boukerzaza Karim (Algérie)
Le roi est mort
La nuit est plus noire ce soir
La lune est plus terne
Que les visages voilés du peuple
Le ciel est pauvre d’étoiles
Comme si elles se sont toutes tombées
Au delà de l’horizon
Le silence est cruel
Il assourdis tous les pleurs
Le palais ; sombre, parait
Comme une tente violée par le vent
Les soldats debout devant la grande porte
Semblent suspendus comme de vulgaires poupées de paille
Les collines au dehors se sont taries de leurs fleurs
Et sur leurs courbures les lions ne rugissent plus
Le roi est mort
Sur la muraille pierreuse ne luit qu’une presque flamme
Et sur les visages ne brillent que des perles de larmes
Le temple n’écoute plus les prières des prêtres
La terre ne rutile plus du sang des sacrifices
Et sur les murs en marbre pourpre
Les traits des dieux sont pales et laids
Le trône vide et froid
Les colonnes rectilignes paraissent courbées
Comme le dos d’un mendiant perdu
Le roi est mort
Dans les chambres les femmes et les esclaves
Pleurent sans cesse
Comme une pluie qui refuse de se tarir
Des dômes des cieux
Et sur les rives du palais
Affluât un torrent de peuple
Des hommes avec leurs corps
Tatoués par l’encre des guerres
Et des femmes portant sur leurs dos
Des enfants qui dorment en silence
Le regard rompant sur la poussière des terres
Les lèvres sèches comme le seuil de l’enfer
Le roi est mort
Dans le temple, dans l’ombre de la déesse – mère
Le roi était dans son vaisseau funèbre
Une bougie irisait son front
Sa pupille semblait se rétrécir sous sa lumière
L’oracle blême et grand
Murmurait de vaines syllabes
Ce soir, on croit plus aux prières païennes
L’encens qu’on sème dans les sillons de l’air
Et le parfum qu’on déverse sur les senteurs
Ne serviront à rien car
Le roi est mort
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